Vous avez certainement peut-être entendu parler de la tendance de la “pédagogie inversée”, d’abord popularisée par le système éducatif comme une réponse au décrochage scolaire de certains étudiants. Aujourd’hui, ce terme est également repris par les professionnels RH des entreprises comme une réponse pédagogique à des dispositifs de formation en recherche d’un nouveau souffle.
Au travers de cet article, nous vous proposons de revenir sur la définition de la pédagogie inversée en 5 points clés sous l’angle de la formation en entreprise pour les collaborateurs et dirigeants.
1. Un peu de culture générale sur le concept de “Flipping Teaching”
Comme de nombreuses nouvelles techniques et inventions qui se respectent, la pédagogie inversée a vu le jour à Harvard grâce à un professeur américain, Eric Mazur (1991).
Ce dernier avait décidé de lancer un programme de “Peer Instruction” en se basant sur le constat suivant : rendre l’élève plus actif en cours permet plus de performance et d’efficacité qu’un cours magistral. A priori, c’est un constat que nous sommes nombreux à avoir déjà fait que ce soit en tant qu’élève, ou bien en tant que participant à une formation, une réunion ou à une conférence !
Eric Mazur a décidé de répondre simplement à ce constat simple. Il propose d’inverser la pédagogie. Les élèves étudient en toute autonomie, depuis chez eux les notions théoriques clés, répondent à un questionnaire avant le cours, et en classe, avec l’ensemble du collectif, le professeur répond au questionnaire, corrige avec les élèves et les fait pratiquer en petits groupes. Son étude démontre des résultats en faveur de la pédagogie inversée pour la discipline qu’il enseignait : l’algèbre. Les élèves en classe inversée réussissent mieux aux examens que les élèves ayant suivi une classe traditionnelle.
2. Une inversion des schémas de classe et formation “classiques” : Théorie puis Pratique
Concrètement, qu’est-ce qui se cache derrière la pédagogie inversée appliquée à la formation des professionnels ?
Il s’agit simplement de recentrer l’apprentissage sur l’apprenant et ses besoins en lui faisant parvenir en amont du contenu théorique (vidéos, livre blanc, supports de formation … On revient sur le concept dans le point 4 de cet article) à assimiler en autonomie pour se dédier pleinement à l’approfondissement de ces concepts et à des exercices lors de la séance de formation entre pairs.
Ce format est très plébiscité par les directions de la formation et RH des grandes entreprises depuis plusieurs années car il permet de bousculer les codes historiques de la formation, et de proposer d’autres expériences, plus ancrées dans une réalité opérationnelle et plus percutante auprès d’un public d’opérationnels et de dirigeants. Ce public accorde plus de crédit à des expériences qui se concentrent sur le partage, la transmission et le pragmatisme.
Une formation autour du Leadership reçoit généralement des avis plus favorables, si les grands concepts fondateurs de Jurgen Appelo, Simon Sinek et Peter Drucker sont traités en amont via des petites lectures ou vidéos par l’apprenant lui-même, puis la formation est dédiée à la mise en pratique par des jeux de rôle, des ateliers de co-développement et des exercices avec les outils.
3. Le “client” de la formation au cœur des préoccupations
Comment s’assurer de maximiser les chances de succès de votre formation ? Partir des besoins et problématiques du client, l’apprenant, semble être une bonne piste de réponse !
Avec la pédagogie inversée, vous vous assurez de mieux comprendre le client et ses besoins.
Pourquoi ? Parce qu’en lui faisant parvenir en amont les concepts théoriques, il arrive directement avec ses questions, ce qui a piqué sa curiosité pour les journées de formation. Ainsi, le formateur peut rebondir sur la liste des priorités des apprenants et maximiser les chances de capter leur attention et leur engagement.
Cela démontre aussi la capacité d’être flexible, et d’en faire des expériences d’apprentissage uniques et originales. Des qualificatifs souvent salués par les apprenants de la formation professionnelle, lassés des formations sur-étagère déployées à grande échelle tout au long de l’année.
Reprenons notre exemple de la formation Leadership. Le manager en pleine transformation de son organisation, et donc de son rôle, souhaite échanger avec ses pairs sur le comment ils appréhendent la transformation de leur rôle. Il souhaite mettre en pratique des outils découverts dans des apports théoriques : les motivateurs de Daniel Pink ou la méthode des Objectives Key Results (OKR). Il souhaite avoir une formation qui traite de ses priorités et problématiques opérationnelles, plus que des formations liées à des concepts propices à des modèles managériaux de start-up, peu réalisables au sein d’un grand groupe.
4. Une mise en place simplifiée par les outils digitaux
La pédagogie inversée ne peut révéler son plein potentiel qu’à condition de faire du triptyque humain – technologie et pédagogie une réalité.
En effet, il s’agit de se concentrer sur les besoins et la psychologie des apprenants, de revoir le séquencement pédagogique, et de tirer avantage de la force du digital pour mettre à disposition les divers contenus en amont de la formation.
La multiplication des Learning Management Systems (LMS) et des plateformes de contenus pédagogiques (LinkedIn Learning, Udemy, Coursera …) rendent possible une expérience d’apprentissage de bout en bout. Ces plateformes utilisées à bon escient permettent de faire des recommandations de lecture à l’apprenant, et évitent de créer inutilement des contenus pédagogiques théoriques par les formateurs. De plus en plus de solutions digitales permettent aussi la création de forums de discussion ou d’entraide pour prolonger l’expérience entre les formations ou au-delà du parcours.
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5. Que retenir ?
Comme toute nouvelle approche, il n’existe pas de solution miracle qui balaye complètement des modèles anciens ayant fait leurs preuves.
Nous avons pu aussi constater au travers de diverses expériences au sein de grands groupes que la pédagogie inversée, seule et exclusive, peut avoir certaines limites. En effet, il est difficile d’obliger ou d’inciter un collaborateur à réaliser en amont de la formation la partie théorique. Ils sont souvent pris par leur business as usual et arrivent le jour J sans avoir visionné ou parcouru les grands concepts théoriques.
On constate aussi que certains “n’achètent” pas cette expérience uniquement par la pratique. Certains ne sont pas habitués à cette mise en pratique permanente, et cela ne répond pas à leurs attentes de formation que d’être sollicités durant des journées entières en tant que particip-acteurs.
On voit de plus en plus apparaître le concept de “pédagogie hybride”, une réponse plus mesurée qui conjugue le meilleur de plusieurs méthodes pédagogiques : la pédagogie inversée, l’échange entre pairs (co-développement) et le partage d’expériences ou aussi appelé “cours dialogué”.
Nous venons de définir la pédagogie inversée. Quant au co-développement, il s’agit d’une pratique encourageant l’échange des pairs entre eux : Apprendre non plus d’un “sachant” mais de l’échange avec ses pairs.
Enfin, le cours dialogué est un échange permanent entre le sachant et les apprenants dans lequel l’intervenant joue le rôle d’animateur du groupe. Cela repose sur la capacité du formateur d’enrichir ses interventions d’un certains nombres d’histoires ou de partages d’expériences.
Nous espérons que cet article vous a permis de démystifier la pédagogie inversée, et d’en comprendre les principales composantes. Comme toute approche, l’essentiel est de préserver un équilibre, d’alterner différents rythmes pour retenir l’attention de l’apprenant, maximiser les chances de succès et de rétention plusieurs mois après la formation.
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Sources : Bergmann, J. et Sams, A. (2014). La Classe inversée. Québec : Editions Reynald Goulet inc. Technologie de l’éducation. p.152. ISBN : 978-2-89377-508-1
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