En tant que manager, vous vous êtes sans doute posé la question : comment identifier la motivation de chaque membre qui compose vos équipes ? Rendre ses équipes performantes, réduire les silos, faire que l’organisation se retrouve dans la somme d’équipes concernées et impliquées… Toutes ces thématiques sont liées au fait que chacun donne de son meilleur, que chacun soit motivé.
1. La motivation, une affaire intrinsèque
Mais en fait, qu’est-ce que la motivation ? Qu’est-ce qui nous fait nous lever le matin pour affronter métro bondé, foule fermée, misère des SDF du matin, puis tête de notre patron, travail répétitif… ?
La motivation est souvent vue par les managers comme la carotte et le bâton. C’est ce qui depuis des âges est utilisé pour faire que le travailleur travaille, depuis le fouet des esclaves jusqu’au salaire des employés. On peut résumer ces éléments sous le vocable “Motivation extrinsèque“.
Or, ce qui nous fait vraiment nous lever le matin (à part notre réveil) c’est l’attrait de voir nos équipes, notre cadre de bureau, le fait de savoir que nous participons à une oeuvre, le fait de découvrir, le fait de savoir qu’on verra notre amant/maitresse, le fait de saliver en avance au joyeux repas qu’on fera entre potes, de savoir que notre quotidien est en lien avec notre but dans la vie…
Ce n’est pas le salaire qui nous fait nous lever…
La littérature regorge de modèles de motivateurs/démotivateurs intrinsèques. Tous s’accordent pour indiquer que le démotivateur est toujours plus fort que le motivateur. Nous vous dévoilons dans cet article deux exemples de modèles pour vous aider à identifier les facteurs de motivation dans vos équipes.
2. Le modèle SCARF
Le modèle le plus simple, SCARF, corollaire du livre de David Rock (Votre Cerveau au Bureau) met en œuvre cinq zones de motivation :
- S comme Statut
- C comme Certitude
- A comme Autonomie
- R comme relations
- F comme Fairness (Justice ou Équité en français)
David Rock met en avant le fonctionnement basique du cerveau : Celui-ci “va vers” ou “s’éloigne de” en fonction d’une récompense ou au contraire d’une souffrance.
Ce fonctionnement explique la majorité de nos réflexes. Nous allons nous blottir au coin du feu lorsqu’il fait froid, nous retirons notre main si elle brûle, nous allons vers le sexe, la nourriture, le soleil sécheur, nous nous éloignons de la froideur, de la douleur, de la faim.
L’auteur nous explique que le cerveau “va vers” en marchant et “s’éloigne de” en courant.
Par ailleurs, les expériences des neurosciences présentées par David Rock laissent à penser que ces réflexes associés aux stimuli physiologiques provoquent les même activités cérébrales que des réflexes associés à des stimuli psychologiques. Ainsi, nous allons vers les relations sociales amicales, nous nous éloignons des engueulades, selon les mêmes cheminement neuronaux que notre “aller vers” manger un bon gâteau et “s’éloigner de” la baffe physique.
Notre cerveau est si simple, en fait. De plus, totalement monotâche pour ce qui est de notre concentration : on ne peut pas gérer simultanément une situation de crise nécessitant prise de décision et une émotion forte.
David Rock met en avant les cinq zones psychologiques facteurs de motivation (“aller vers”) ou démotivation (“s’éloigner de”).
Ainsi, le Statut est ce qui nous fait nous comparer à autrui ou à soi même. Ce statut, nous le défendons à tout moment, nous le surveillons, nous faisons des combats de coqs pour le préserver. Dès qu’une menace apparait sur le statut, nous réagissons en protection, en fuite. Dès que nous avons la possibilité de le rehausser, nous nous dirigeons vers.
De manière générale, le statut peut prendre toutes sortes de formes. De la voiture statutaire au galons, en passant par la position hiérarchique, le dépassement d’un record, la réalisation d’une œuvre artistique, la participation à la construction d’un pont… Tout peut devenir support de statut.
Une façon de gérer notre rapport au statut est de transposer son support vers quelque chose de personnel. Par exemple, le statut lié à la position hiérarchique dans l’entreprise est bafoué ? appliquons un transfert sur un nombre de minutes de course à pied. Des que nous aurons fait plus que notre objectif quotidien, notre statut en sera rehaussé, notre frustration concernant notre position hiérarchique diminuera.
La Certitude est le fait que le cerveau puisse prévoir ce qui va arriver. De constater qu’une vision est érigée, que nous allons vers un objectif, nous motive. En revanche, de savoir que nous ne savons pas ce que sera notre organisation dans 3 mois nous démotive au plus haut point.
L’Autonomie est le fait que nous puissions choisir nos actes, prendre nos propres décisions. Si nous effectuons des actions commanditées par d’autres (sous couvert de leur statut) nous serons moins enclins à y apporter toute notre ferveur. Si nous choisissons nous-même notre action, nous sommes motivés. Est-ce un corolaire du statut transposé ? Est-ce dû au fait que nous sommes égocentriques ? Qu’importe, le fait est là : nous apprécions notre autonomie, nous fuyons les dictats.
Les Relations avec les autres. L’être humain reste un animal grégaire. Il n’existe au fond que par le regard des autres. “Je pense, donc je suis” est un paradigme très élaboré et égocentrique. Nous n’existons que parce que le groupe nous incorpore. Seul, je ne me motive que très peu. Si je suis capable de montrer aux autres ce que je suis et ce que je fais, alors je suis beaucoup plus poussé à y aller.
La Justice (Fairness) nous fait avancer. L’injustice nous révolte, quelle qu’elle soit.
3. Les motivateurs du Management 3.0
Le Management 3.0 de Jurgen Appelo met en avant la motivation comme rouage de l’innovation dans les équipes. Une distinction est faite entre motivation extrinsèque et intrinsèque, et une série de 10 motivateurs intrinsèques est proposée :
- Cadre/Ordre : Mon environnement est stabilisé par des règles et procédures
- Statut : Ma position est adéquate et reconnue par les personnes travaillant avec moi
- Pouvoir : J’ai assez d’espace pour influencer ce qui se passe autour de moi
- Objectif aligné/But : Mes objectifs personnels de vie se concrétisent dans le travail que je réalise
- Performance : Mes missions représentent un challenge mais restent dans mes capacités
- Acceptation : Les gens autour de moi approuvent ce que je fais et ce que je suis
- Indépendance : Je suis indépendant(e) des autres avec mes propres activités et responsabilités
- Honneur (loyauté) : Mes valeurs personnelles sont cohérentes avec celles du groupe de personnes avec qui je travaille
- Social : J’ai des bons contacts sociaux avec mes collègues, mes collaborateurs et les personnes avec qui je suis en relation
- Curiosité : J’ai de nombreux sujets d’investigation et de l’espace pour l’apprentissage et l’innovation
Le nombre de motivateurs n’est pas un gage de supériorité ou de précision, ni de justesse. Il suffit de s’apesentir un peu sur les 10 thèmes de Jurgen pour constater qu’ils sont orthogonaux aux 5 thèmes de David.
En revanche, le Management 3.0 propose de jouer avec ces motivateurs (le jeu Moving Motivators) soit à titre personnel, soit en binôme afin d’élaborer ce qui pour soi est important, et ce qui, dans l’environnement actuel ou futur, est pour soi mis en valeur. L’objectif du jeu étant de tenter d’améliorer l’environnement des zones de motivation faibles.
Cet outil est puissant, car les facteurs de motivation en équipes peuvent être interprétés par chacun à sa convenance, le plan d’actions résultant de l’exercice est dès lors spécifique à chacun.